Il n’y a que les montagnes qui ne se rencontrent pas. Un vieux proverbe qui veut simplement dire tout le contraire dans la vie des hommes ou des humains. Comme pour dire, que rien, rien n’est impossible, surtout en politique. Oui, la politique est dynamique. Deux implacables adversaires d’hier peuvent, demain, devenir des alliés «fidèles». Et vice-versa. De même, des vaincus d’hier peuvent demain se muer en vainqueurs. Et vice-versa également.
L’espace politique congolais compte de nombreux exemples dont certains sont emblématiques.
Ils se sont traités de tous les noms de «Judas» et de «Satan», après leur divorce entre «pperdiens», dû certainement à des secrets calculs et ambitions politiques personnelles. Aujourd’hui, face à l’adversaire commun qu’est Tshisekedi, Katumbi et Kabila se font la cour depuis trois ans, une cour assidue, pour faire cause commune.
Après avoir qualifié de «médiocre» et de «nulle» la gouvernance de Kabila, l’éminent prélat congolais, feu le Cardinal Monsengwo, ne s’est pas empêché de s’approcher de la famille Kabila, politique et biologique, pour dire la messe à l’occasion de l’anniversaire de naissance du Raïs et de sa jumelle. Et en l’absence des concernés eux-mêmes.
Tournons cette page.
Alors, Tshisekedi-Kabila dans un face-à-face présidentiel en 2028 ? Pourquoi pas. C’est politiquement possible.
En dépit du fait qu’il est définitivement inéligible à un autre mandat présidentiel, selon l’esprit et la lettre de la Constitution du 18 février 2006, l’homme fort de Kingagati semble n’avoir pas encore dit son dernier mot. Bien que « taiseux » lui-même, pour reprendre l’expression de l’un de ses fidèles, l’ambition de Kabila de revenir coûte que coûte au pouvoir transparaît dans les discours des siens et surtout, dans les nombreuses apparitions et prises de parole de la Très distinguée ex-First Lady, son épouse, Mme Olive Lembe Kabila.
Personne n’est dupe.
De l’autre côté, c’est le même décor. A la fin de son mandat en cours, le deuxième, l’actuel président, Tshisekedi, logera à la même enseigne que son prédécesseur. Il sera lui aussi inéligible, toujours selon l’esprit et la lettre de la même Loi -fondamentale.
Ici aussi on pourrait dire, personne n’est dupe non plus. Bien que ne s’étant pas prononcé lui-même pour un éventuel troisième mandat, beaucoup de partisans du successeur du Raïs ne cachent pas leur volonté de voir celui-ci rester encore à la tête du pays au-delà de 2028. D’ailleurs les adversaires politiques du régime en place, les Kabilistes en tête, accusent celui-ci de chercher à s’éterniser au pouvoir. La modification ou le changement de la Constitution ne serait qu’une stratégie à cette fin.
Et pourtant. Et pourtant, plusieurs observateurs pensent que l’ancien président serait tout autant bénéficiaire d’un nouvel ordre constitutionnel en ce que, celui-ci ferait sauter le verrou qui le bloque dans celui du 18 février 2006. Etant donné que le compteur serait remis à zéro pour tout le monde.
Dans cette perspective, un duel entre Tshisekedi et Kabila pourrait être envisagé en 2028 et mettrait notamment le clan PPRD dans un scenario de la revanche. Comme celui que les USA ont offert au monde avec le duo Biden-Trump.
Alors, si Kabila veut revenir au pouvoir par la voie démocratique, à moins qu’il envisage d’autres moyens, il ne serait que logique qu’il fasse plutôt cause commune avec Tshisekedi pour défendre la thèse de la modification ou du changement de la Constitution.
Bien évidemment, l’obstacle à l’éligibilité de l’ancien président n’est pas que juridique. Une fois celui-ci levé avec l’adoption d’un autre texte constitutionnel, des dossiers judiciaires pourraient malheureusement le rattraper. Ceci pourrait d’ailleurs expliquer, peut-être cela.
Depuis le premier trimestre de l’année dernière, l’ancien Chef de l’Etat vit en dehors du pays. Selon ses partisans, c’est pour des raisons académiques. Mais pour le régime en place, il se serait plutôt exfiltré clandestinement et se trouverait dans une situation d’exilé politique. Son successeur l’a d’ailleurs publiquement accusé de chercher à organiser une insurrection et d’être le maître à penser de l’AFC de Nangaa.
Plusieurs autres dossiers judiciaires, notamment ceux liés à la gouvernance et aux droits de l’homme, pourraient aussi être exhumés.
Mais Donald Trump n’a-t-il pas connu des démêlées judiciaires pendant les quatre ans de règne de son successeur ? Il est pourtant revenu avec pompe à la Maison Blanche.
Donc, Tshisekedi-Kabila en 2028, ce ne serait pas une utopie. Autant les deux ont donné à la République la première alternance pacifique au sommet de l’Etat, autant ils pourraient encore, eux deux, écrire dans les pages de l’histoire de la RDC, une autre première expérience d’une sorte de match retour entre les deux principales forces politiques. Quitte à l’un et à l’autre camp d’accepter sportivement le résultat, le moment venu.
GAF