Le « courageux » de N’shole et le « gâteau » d’Ambongo

Ils sont tous deux les prélats les plus « politiques » de la très puissante CENCO (Conférence épiscopale nationale du Congo) et les plus anti-régime. Ils ne mettent pas de gants et font toujours usage des qualificatifs à forte charge émotionnelle pour tirer sur le pouvoir en place. L’un est passé il y a peu, de titre d’abbé à celui d’évêque et assume depuis février 2017 des grandes responsabilités au sein de la CENCO  comme secrétaire général, tandis que l’autre trône à la tête de l’archidiocèse de Kinshasa depuis novembre 2018 et est cardinal depuis octobre 2019.

Avant, pendant et après le processus électoral de décembre 2018, alors qu’il n’était encore que celui qu’on appelait Abbé Donatien N’shole, le secrétaire général de la Conférence épiscopale du Congo a dû jouer un rôle des premiers plans en faveur, on le saura après, de la plateforme Lamuka dont on comprendra plus tard également qu’il devait en être l’un des concepteurs et l’artisan du plan de Genève. Un plan dont l’objectif aura été, ç’a été dévoilé par la suite, de contourner le candidat commun logique, Félix Tshiekedi, au profit d’un candidat commun de substitution, Martin Fayulu.

Et c’est encore lui, M. l’abbé N’shole d’alors qui eut le courage de tenter de court-circuiter la Commission électorale nationale indépendante (CENI) en annonçant précipitamment qu’il connaissait déjà, lui, grâce à ses quarante mille smartphones déployés dans les différents bureaux électoraux disséminés à travers le pays, le « vainqueur » de la présidentielle (sous-entendu, Martin Fayulu). Bien avant la CENI et son président d’alors Corneille Nanga.

Nous connaissons, tous, les dégâts que cette imposture d’un serviteur de Dieu a provoqués au pays sur le plan de la cohésion et de l’unité nationale.

Promu évêque entretemps par la hiérarchie de l’Eglise de Rome, Donatien N’shole a pourtant continué sans désemparer son combat politique contre le pouvoir en place. Mais cette fois, en duo de choc avec l’archevêque de Kinshasa, le cardinal Fridolin Ambongo. Ce dernier s’est même révélé comme l’un si pas l’adversaire le plus acharné de la gratuité de l’enseignement primaire public. Curieux pour un homme de Dieu qui dit être du côté des pauvres.

Mais c’est lors du processus de désignation de la personne qui devait remplacer Corneille Nanga à la tête de la centrale électorale que les deux hauts-cadres de l’Eglise ont clairement affiché leurs couleurs et montré leurs préférences.

Malheureusement, ou heureusement, c’est selon, à la faveur du jeu démocratique, leurs candidats, à la CENI comme lors du scrutin présidentiel du 30 décembre dernier, ont perdu la poussière. Ces échecs, ajoutés à ceux décembre 2018 n’ont fait que décupler la rancœur de ces deux prélats ainsi que la toxicité du venin que véhiculent leurs discours.

Ce n’est donc pas surprenant que dans son homélie pascale de la semaine dernière, Fridolin Ambongo ait considéré la RDC, c’est-à-dire,  la gestion des affaires publiques, comme un  « gâteau »  et justifié ainsi l’entrée en rébellion armée de ceux qui se considèrent comme des « exclus » du partage de ce gâteau

Lors du briefing avec la presse, le ministre sortant de la Communication et Médias, Patrick Muyaya, dont une bonne partie de l’opinion nationale souhaite la reconduction au prochain gouvernement, a vu juste en faisant le lien entre le « gâteau » du cardinal et l’appel au « courageux »  lancé ou suggéré l’année dernière par Mgr N’shole aux plus forts temps du processus électoral où beaucoup ne juraient que sur son  blocage..

Le courageux, c’est certainement, ironie de l’histoire, Corneille Nanga dont la publication des résultats officiels des scrutins de 2018 avaient été contestés avec zèle par le même prélat.

Mais là où le jeune ministre sortant se trompe, c’est quand il appelle l’archevêque de Kinshasa à clarifier sa pensée devant l’opinion nationale pour que ses propos ne soient pas interprétés comme une caution, un encouragement ou une prime accordée à ceux qui choisissent de prendre les armes contre le pays.

Non, M. le ministre, ll n’y a rien à clarifier. Les propos du cardinal sont en eux-mêmes clairs et limpides.

A l’église catholique, l’officiant termine toujours son sermon par cette formule célèbre: « Oyo aza na matoyi ya koyoka….Ayoka… »qui signifie littéralement: « que celui qui a les oreilles pour entendre, entende… »

Donc, au lieu d’attendre des explications de l’archevêque de Kinshasa comme l’a suggéré le porte-parole du gouvernement sortant, maints observateurs attendent plutôt des autorités étatiques une action d’interpellation judiciaire pour des propos pour le moins graves de la part d’un leader social de cette trempe, soit-il un prince de l’église.

Gaf

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