Afrique: la colère du professeur Théophile Obenga

« Jai bien connu le Prof Théophile Obenga depuis Libreville au Gabon où il fut Directeur Général de CiCIBA. C’est un panafricaniste avéré, égyptologue élève de Cheikh Anta Diop qui lui avait appris à déchiffrer le hiéroglyphe. Le Centre International de Civilisation Bantoue dont l’initiateur est le Président Omar Bongo Ondimba ,a son Siège Social à Libreville. Le Prof Obenga fustige le manque actuel de leadership dans toute l’Afrique et surtout le manque d’inspiration créatrice des politiques de rechange contre le colonialisme et le néocolonialisme :la plupart des partis politiques en Afrique n’ont pas d’idéologie ni d’idéal. C’est le cri de cœur d’un Panafricaniste pour réveiller la Jeunesse Africaine. C’est ce que le PSA ne cesse de faire depuis environ 45 ans. » Réaction du Dr. Jibi Ngoyi, président du Parti socialiste africain (PSA), à l’analyse du professeur Théophile Obenga qui, il y a quelques années, s’insurgeait contre le colonialisme et le néocolonialisme du monde occidental qui s’est illustré tout au long de l’histoire humaine par de nombreux épisodes de violence, d’une violence extrême pour s’imposer et dominer les autres. Gâchette d’Afrique revient sur cette analyse du scientifique congolais (du Congo Brazzaville) qui reste d’actualité permanente. Une analyse qui interpelle l’Afrique et les dirigeants africains actuels pour leur manque d’idéal et de leadership patriotique pour émanciper le continent noir après des siècles d’humiliations subies. Ci-dessous, le transcrit de quelques extraits forts du message de Théophile Obenga tenu lors de son passage sur une chaine internationale

Pas une domination de la race blanche, mais des groupes d’intérêts

« Mon discours s’adresse à l’Afrique. ça peut ne pas plaire aux autres, mais je m’adresse essentiellement aux Africains. Vous dites, la domination blanche, c’est-à-dire, ils ont dominé les Noirs, c’est une affaire de races. Je ne crois pas tout à fait que ça soit exact. Ce n’est pas les Blancs comme tels qui ont envahi l’Afrique noire. Ce sont les intérêts, les groupes d’intérêts, intérêts d’Etat, intérêts financiers, des groupes, etc. c’est eux qui ont eu intérêt à venir, c’est un système, à venir coloniser, si vous voulez,  l’Afrique. Bon, comme ils sont Blancs, on dit, les Blancs, tous les Blancs. En fait, non, il y a des Blancs qui se révoltent aussi contre ce système. Donc, ce n’est pas tout à faut une affaire des Blancs. L’Europe, à part le charbon, ils n’ont rien dans leurs sous-sols. Absolument rien du tout. Ni cuivre, ni diamant, ni or, ni fer, ni uranium, ni tungstène , ni cobalt. Il n’y a strictement rien.  Ils ont cassé leurs forêts depuis le Mouen-Age, ils n’ont presque plus de forêts, de bois. Du coup, ils viennent, soit en Amazonie, casser la forêt, soit sur le continent africain, casser la forêt, tuer les éléphants, prendre de l’or, du diamant. Ils sont les premiers producteurs du diamant au monde à Anvers alors qu’il n’y a même pas un seul graine de diamant en Belgique. Anvers devient la capitale du diamant. Ils prennent ça en Afrique. Et comme ils avaient une certaine supériorité technique, ils ont dominé. Et quand vous subissez ça un siècle entier, si vous ajoutez encore l’apartheid et avant, il faut ajouter au moins 6 siècles d’esclavage, des millions et des millions. Au moins 500 millions d’Africains sont partis en esclavage dans le Nouveau monde, soit disant. Alors, vous comprenez que l’Afrique était complétement destructurée, complètement détruite. Complètement. Il faut féliciter les Africains, qui, en un siècle, ont rattrapé quand même. Nous sommes nombreux maintenant, on occupe l’espace. Et dans vingt ans, peut-être, on sera 1 milliard et quelques. Donc, on n’est pas éliminé. Parce qu’on peut être éliminés. Les Indiens ont été éliminés en Amérique du nord. Ils vivent dans les réserves aujourd’hui, dans un pays de démocratie. Ils vivent dans les réserves. Donc, on les a éliminés, on les a écartés de la richesse nationale, du pays. La même chose en Amérique latine, c’est les Espagnols, les Portugais qui dirigent là-bas. L’Espagne n’;a rien, le Portugal n’a rien. Mais là-bas, ils sont tout riches, ils ont éliminé et tué tous les Indiens, les mettre dans les forêts, les réserves. C’est ça violence de  l’histoire de l’Occident. Une violence extraordinaire. Les conséquences sont énormes parce que d’abord, c’est l’être humain qu’il faut détruire. Quand vous détruisez l’être  humain, vous lui créez des réflexes. Aujourd’hui nous avons des réflexes. »

L’UE finance l’UA, c’est le plus grand crime

« Est ce que le président Kwame Nkrumah peut prendre l’argent de l’Union européenne pour financer l’Union africaine? C’est impossible. Sankara ne peut pas le faire, Lumumba ne peut pas le faire, Sékou Touré ne peut pas le faire. Aujourd’hui, on le fait. Donc, l’Europe continue à dominer. Comment voulez-vous, c’est comme si l’Union européenne payait une association asiatique, comme si l’Union européenne payait une association américaine, comme si l’Union européenne payait, je ne sais quelle association… Ils ne payent même pas la Grèce, ils viennent payer l’Union africaine. Mais, ça c’est le plus grand crime. »

Banque mondiale et FMI, des instruments d’asservissement

« La même chose, quel est le pays du monde qui était malheureux, arriéré, pas développé, et la Banque mondiale et le FMI sont venus pour le développer? Aucun pays. Et puis, on fait semblant de mettre dans quelques Africains de ces structures pour les envoyer en Afrique. Pourquoi la Banque mondiale et le FMI n’envoient pas les Noirs qui travaillent qui travaillent là-bas en Chine, ou en Corée, ou en Indonésie, ou en Afghanistan, ou en Australie. C’est la colonisation. Et puis, ces Noirs  censés être compétents, ils appartiennent à un système qui détruit l’Afrique. Comme si pendant l’esclavage, un autre Noir peut surveiller les Noirs esclaves sur la plantation.  Il n’est pas moins esclave, même s’il surveille. Donc, les Africains qui travaillent dans la Banque mondiale, ils sont esclaves comme nous, ils sont aussi colonisés, c’est les illusions simplement. C’est ça le problème. Donc, on a détruit la confiance, on a créé des réflexes de subordination, des réflexes de besoin du maître. L’esclave a toujours besoin du maître. Il ne peut pas être libre. On leur donne le pays, ils viennent faire les accords, on fait ceci, ils font ce qu’ils font. C’est pire même qu’avant. Ils font des ajustements structurels, ils viennent dire, voilà, faites vos programmes on va vous financer, on va vous endetter. On était d’abord esclaves, colonisés, et aujourd’hui, c’est les pays les plus pauvres. »

Manque de solidarité entre Africains

« Aujourd’hui, tu crois que Kwame Nkrumah serait au pouvoir, il aurait regardé le Mozambique, l’Afrique australe dans l’inondation sans réagir? Le président El  Sissi, il est président de l’Union africaine, il ne réagit pas. Aucun pays africain ne réagit. Et c’est 700 mille personnes qui meurent. Si c’était par exemple aux Etats Unis, même les Noirs auraient contribuer pour donner l’argent là-bas. Si c’était au Canada, les Noirs auraient contribué pour donner l’argent. Mais leurs propres frères meurent, l’Union africaine ne fait strictement rien du tout de saillant, de visible et d’important. Ils ne rendent même pas compte. Quand il y a élection dans des petits pays, l’Union africaine envoie des délégués, qui sont souvent mêmes corrompus aussi. Maintenant quand il y a des inondations, des catastrophes, l’Union africaine n’envoie même personne, pour voir. Vous voyez que c’est des structures qui sont manipulées, qui n’ont rien d’africain, il faut souhaiter que ça disparaisse, que d’autres structures, d’autres Africains viennent. Parce qu’il n’y a même pas de patriotisme. Voilé, le problème, c’est les séquelles, on arrive pas à être soi, à avoir confiance en soi. Aujourd’hui, les Etats-Unis d’Amérique, avant tout le monde, au 18e siècle, ils ont vu clair, les dirigeants là-bas. Ils ont eu un idéal: il faut faire un Etat fédéral. D’autres ont voulu, d’autres n’ont pas voulu. Ils sont parvenus à faire un Etat fédéral: puissance, avant tout le monde et dominent. Les Chinois, après la longue marche de Mao Tsé Toung, quand ils ont installé le parti communiste en Chine, ils ont eu un idéal. Un grand pays, plusieurs milliards d’habitants, comment faire quoi avec ça? Il faut qu’on construise, qu’on soit discipliné, qu’on travaille et qu’on ait place dans l’humanité. Les états africains aujourd’hui, il n’y a aucun idéal. On fait la santé, on fait l’école, on fait quelques routes, on fait le commerce, mais quel est l’idéal de ça? Quel est l’idéal?

Il n’y a pas d’idéal. Et quand il n’y a pas d’idéal, vous ne pouvez pas avancer, vous tournez en rond. Vous faites les élections, vous changez les Constitutions, on vous applaudit, vous tournez en rond, les partis politiques, on vous met en prison, on vous libère, on fait des alliances, mais ça va pas loin, ça ne dégage pas les énergies d’une nation, les énergies d’un pays, parce que, il n’y a pas d’idéal. Il faut un idéal pour se développer. L’idéal de l’Afrique, c’est avoir un gouvernement continental, fédéral. C’est ça qui va sauver. Les Etats-Unis sont grands, ils contrôlent même l’Amérique latine, le Canada, le Mexique. Ils sont puissants. Ils contrôlent même l’Europe parce qu’ils ont l’Alliance Atlantique, Trump, quand il parle, tout le monde panique. Quand il dit dit, ne commercez pas avec l’Iran, celui qui va faire avec l’Iran, ils boycottent, ils ne vont pas, ils ont peur. parce que les Etats-Unis sont puissants.

Miser sur la formation de la jeunesse.

« Il suffit de décider un idéal. Il faut faire les universités africaines, parce que nous sommes même dans la modernité.. Il y a les sciences, le savoir moderne, c’est très compliqué, c’est scientifique. Nous voulons vivre même ça, au lieu d’envoyer toujours nos éléments en Europe, à l’extérieur, on peut commencer par les universités sur le continent africain. Au moins ça. Pas seulement pour un pays, mais pour une région ou pour le continent. Et puis, former la jeunesse ».,

« Et puis, ils vont grandir avec d’autres idéaux. avec d’autres sentiments patriotiques, et ils pourront plus tard, peut-être les futures générations, ayant été éduquées dans un certain patriotisme panafricain, pourront en ce moment-là créer d’autres structures africaines.

Banque mondiale et FMI, out!

« Je crois que, il ne faut plus que la Banque mondiale et le FMI viennent sur le continent africain. Il faut les interdire strictement, qu’ils ne viennent plus. Il ne faut pas qu’ils viennent, parce qu’ils ne pourront jamais, au grand jamais, développer l’Afrique. C’est impossible. » « La Banque mondiale, vous voulez nous développer? Qu’ils nous fassent un plan d’ingénieurs. Voilà, pendant cinq ans, dix ans, nous allons former des ingénieurs africains, dans l’agronomie, dans l’industrie, dans l’énergie, etc. ou dans les transports.  Voilà un plan qu’il faut faire. Mis, ils vous parlent  des problèmes d’ajustements structurels: il ne faut pas augmenter les salaires, il ne faut pas faire les écoles, il ne faut pas faire les hôpitaux, Vous avez déjà vu le FMI parler des écoles ici en Afrique?  Mais, ils vous parlent de l’agriculture, on va donner les aides agricoles. Mais, vous voyez bien que vous ne pouvez pas vous développer en faisant un champ de maïs. »

Transcrit par Gaf

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